Tourisme 2030 : Quelle morphologie à long terme ?

Publié le par Achraf AHMINI

Trois scénarios prévisibles par le HCP
«Le faible développement actuel du tourisme marocain renferme nécessairement un grand potentiel encore inexploité et que le Scénario S3 est bien celui qui cherche à exploiter ce potentiel de la meilleure manière envisageable aujourd'hui», c'est ce qui ressort du rapport élaboré par le Haut commissariat au Plan (HCP) sur le secteur touristique

Des projections du secteur en 2030 qui envisagent trois principaux scénarios dont le premier est baptisé "La route de l'expérience", le deuxième "Vers le développement durable" et le troisième "Vers un tourisme de la connaissance".

Si le Scénario S1, enclenché par la Vision 2010, repose essentiellement sur le succès des stations balnéaires du plan Azur et du tourisme urbain, tout en s'appuyant sur l'amélioration des moyens de transport par la voie aérienne vers le sud (avec baisse des coûts) et par la voie terrestre avec les autoroutes du nord du Maroc, et si le Scénario S2 du développement durable s'appuyait nécessairement sur le volontarisme de l'action publique, le Scénario S3 est plutôt dicté par les forces de marché.

Celles-ci devraient être associées à une plus grande intégration économique dans le sens du co-développement avec les voisins européens du Nord.

Dans ce scénario, le développement de relations institutionnelles très étroites avec l'Union européenne (UE) conduit à une participation plus active du Maroc dans un marché intérieur européen sans frontières et ce, à un moment où l'UE développe la société de la connaissance et recherche des formes de tourisme avec un plus haut contenu en valeur ajoutée.

Dès lors, le tourisme marocain, offrant des destinations moins matures que celles du nord de la Méditerranée, peut servir de point d'amorçage pour de nouvelles offres dans le tourisme à haute valeur dans l'échelle psychologique (tourisme éducatif, de recherche, de développement intellectuel).

Cette nouvelle offre se développe dans un contexte de chaînes de valeur internationale qui stimulent les productions locales et contribuent au développement du capital humain marocain. «Axés sur un tourisme initialement élitiste, les éléments quantitatifs concernant les arrivées sont moins importants que dans le Scénario S1, mais les niveaux de services étant plus avancés, les revenus touristiques sont plus importants.

Il s'agit donc d'un scénario de «leap frogging» dans lequel le Maroc brûle des étapes de l'évolution du tourisme pour rejoindre les zones en pointe dans la transformation des contenus de l'activité touristique, selon le rapport.
Ce scénario semble réalisable. Encore faut-il que certains préalables soient réunis.

En effet, il présuppose, en premier lieu, un changement important dans la gestion du partenariat euro-méditerranéen avançant vers des situations d'intégration et de co-développement.
En second lieu, il repose sur des contenus technologiques dépendant de chaînes de valeur dont les structures décisionnelles échappent à la capacité actuelle du secteur touristique marocain.

Il semblerait que l'ambition de cette entreprise prospective devrait amener à une prise en compte plus grande, dans les programmes prévus dans "la Vision 2010", des composantes du scénario du développement durable plus exigeant,
en termes d'aménagement du territoire et de renforcer les niches relevant du tourisme de la connaissance qui devrait se déployer, de plus en plus, dans le paysage touristique national.

Ceci sans négliger l'importance de la première phase, celle du Scénario S1, la Route de l'expérience, qui est à la fois un scénario tendanciel et un scénario de référence pour Tourisme 2030.
En effet, non seulement il s'inscrit dans les tendances lourdes du système touristique, mais encore il incorpore les principaux facteurs de changement. Sur le plan quantitatif, il s'agit d'un scénario avec forte croissance des flux touristiques. En particulier, les arrivées
de touristes étrangers, qui avaient augmenté à un taux annuel moyen de 3,8% sur une longue période (1982-2005), taux qui était de 7,2% au cours de la dernière décennie (1995-2005),
sont supposées atteindre un taux de croissance de 8% pendant la période restante de Vision 2010 (2005-2010) pour se maintenir entre 6% et 7% jusqu'en 2030.

Cette performance requiert nécessairement une importante expansion de l'offre et des infrastructures qui reçoit l'appui d'une politique active du gouvernement marocain prolongeant au-delà
de 2010 les programmes de communication et ceux d'infrastructures.
Les capitaux internationaux, et en particulier les capitaux européens, contribuent à une forte augmentation des
investissements privés, directement ou en collaboration avec des capitaux marocains.

Reste à préciser que ces scénarios peuvent être remis en cause à plus ou moins long terme. «Le but de leur élaboration n'est pas de choisir un des scénarios en excluant toute autre variante, mais d'aider à la conception d'une stratégie, pour faire face aux différentes incertitudes qui marquent le futur».

_________________________________

Risque de dysfonctionnement

Comme l'expérience d'autres pays l'a mis en évidence par le passé, les risques de ysfonctionnement du Scénario S1 de référence sont fondamentalement de trois types.

Il s'agit tout d'abord du multiplicateur de revenus qui peut s'abaisser significativement si la réaction productive ne se produit pas et si la satisfaction des demandes des touristes se fait par l'importation de biens et services en provenance des pays émetteurs de
tourisme.

Ensuite, l'insuffisance de la capacité de financement interne (déjà constatée pendant les cinq premières années de Vision 2010) qui peut ralentir l'effort de création d'infrastructures. Enfin l'augmentation de l'utilisation des ressources naturelles induite par les flux de touristes (consommation d'eau et d'énergie, utilisation résidentielle de terres fertiles, transformation de paysages, détérioration de vestiges historiques et archéologiques, etc.). Des développements qui peuvent avoir des coûts implicites réduisant la qualité de la croissance économique engendrée par le tourisme de masse.

REPÈRES
Priorités
> Comme dans l'expérience ibérique, le tourisme international et domestique s'accompagne d'une expansion rapide des résidences secondaires (dont l'effet multiplicateur sur l'économie est supérieur à celui du tourisme traditionnel). Cette expansion de logements résidentiels se distribue sur le territoire à la fois dans les zones balnéaires et dans les centres historiques urbains (Marrakech, Fès, etc.).
> Sur le plan de la stratégie productive au Maroc, le Scénario S2 donne la priorité au tourisme intérieur et rural qui est une source de revenu pour des populations agricoles et artisanales, à la protection du littoral et à la gestion efficace de l'eau et de l'énergie.

Source : LE MATIN Par : Nadia Benyouref

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article